Entouré de re-mords, je suis !
Tous les jours et tous les jours c’est la même chose. Les Dernières Nouvelles d’Alsace que je lis frénétiquement, au quotidien, au point de presque retenir les articles par cœur m’offrent un terrain d’études idéal.
Des coronaires ratés par ci, des cancers fulgurants par là, des accidents de voiture ou des ruptures d’anévrisme, un printemps qui tarde trop ou une cause inexpliquée… tous les jours vous mourez. Tous les jours je parcours les faire-part de décès, et tous les jours je m’énerve.
C’est bien de mourir, car c’est une histoire qui ne se termine pas bien, mais vous mourez mal. Du moins, en général. On me dit souvent « ne plaisante pas avec ça ». Et bien si, justement et na !
C’est vrai quoi ! Une personne âgée de 91 ans par exemple, qui vient de passer 10 ans dans une maison de retraite à chanter « à la pêche aux moules », qui ce faisant a ruiné ses héritiers et plombé un petit plus encore le déficit déjà béant de notre chère sécurité sociale… A quoi ça sert ? Que dira-t-on d’elle ? « Oh, c’est une bonne journée que celle de son décès, maintenant elle n’a plus à s’occuper de rien » ou « quel grand âge, et dire qu’elle ne se reconnaissait même plus dans le miroir »… Moi ce que j’en dis : aucun mérite de mourir à cet âge là. Plus personne ne se souvient de ce qu’elle a fait dans sa vie, sauf si bien évidemment l’héritage en vaut la peine.
Non, moi ce que je dis, c’est que les bonnes morts, les vraies, les véritables sont celles qui vous fauchent à 20 ans par exemple. Tout le monde vous promet un grand avenir, votre compagne ou compagnon pense réellement que vous êtes son Grand Amour, vous n’êtes victime encore à ce jeune âge d’aucun trouble obsessionnel compulsif (les machines à laver à chargement frontal par exemple ne vous intéressent pas du tout et vous ignorez qu’il existe une Gestalt-thérapeute répondant au doux nom germanique de Dr Schneider).
Mais voilà : vous êtes mort, jeune et sans façon. Direct et radical. Sans chichi et sans grandes pompes. Ca aura couté quoi ? A peine les pompiers (bénévoles) et une tentative de désincarcération (la voiture était foutue de toute façon).
Et en plus, on vous pleure sincèrement, on pense réellement que vous étiez un chic type, une brave fille. Les regrets sont réels, les marques d’affection authentiques. C’est beau, ça a de la classe, ça en jette. Rideau !
Mais évidemment, ces exemples-là sont rares. La majorité d’entre vous a décidé de prendre toutes les précautions nécessaires : le taux de cholestérol est surveillé au plus près, les triglycérides scrutés quotidiennement, la ceinture de sécurité portée en permanence, vous enfilez même des bas de contention. Vous n’êtes que des lâches.
En ce qui me concerne, j’ai décidé de ne jamais mourir. J’ai dépassé tout juste ce fameux cap des 20 ans (bon, à peine deux fois, et alors) et je me dis que je vous manquerai beaucoup trop, Moi, pour de vrai. Mourir moi ? vous n’y pensez pas ! plutôt crever !